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Et pourquoi pas, dis ?
28 septembre 2016

Réformez-moi (mais pas trop fort)

Si j'avais le temps, je te parlerais de la réforme du collège, qui est arrivée à pas de géant, bulldozer en bandoulière et gros sabots aux pieds, sans que personne ne s'en émeuve vraiment.

Je te raconterais quelles grandes ambitions cette réforme a pour tous nos collégiens, quelles formidables avancées elle propose, quel changement radical elle impose, quelles merveilleuses idées elle envisage.

Et je te raconterais aussi comment la réforme croit en Dieu, au père Noël et à la petite souris en même temps, sans pour autant envoyer du rêve à tous les étages.

*L'éducation nationale ou la bipolarité de la scolarité*

C'est dommage, hein, que les journées ne fassent que 24 heures.
Parce qu'avec toutes les réunions, formations, concertations (et plein de trucs en -ions) (sauf fellations, je te vois venir) (si, si) qu'on se farcit -et c'est logique, hein, vue son ambition (tiens qu'est-ce que j'disais), à Miss Réforme 2016, on aurait bien besoin de quelques heures de rab.

Et je pourrais t'en parler plus longuement, essayer de discerner le vrai du faux, faire la traduction du sous-entendu, expliquer dans les faits ce que ça va changer.

Au quotidien, ça va changer un certain nombre de choses pour ton adoleschiant qui est au collège, pour toi, chanceux parent de l'adoleschiant sus-nommé, et pour moi, aussi.
Déjà, 26 heures par semaine. Pas une de plus.
(Pas pour moi, hein, moi je suis une feignasse qui ne travaille QUE 18 heures, et ça, ça ne change pas) (j'ai envie de dire ouf) (ouf).
Enfin si, attends, si ton enfant fait des langues anciennes (latin, grec), il a droit à une heure ou deux de rab. Mais sinon, 26 heures.
Dans ces 26 heures, les mêmes matières qu'avant. Donc mathématiquement, il a bien fallu rogner un peu, sinon ça rentrait pas, tu vois. Une demi-heure par ci, une demi-heure par là, les profs et les enfants n'y verront que du feu si on leur enlève un poil de techno, un chouïa de maths et une pincée de français, non ?...
Ben oui, puis pour compenser cette demi-heure en moins en 6ème, par exemple, on n'a qu'à lisser le programme sur 3 ans, appelons ça un cycle, et hop, finis les problèmes de programmes trop longs.
Tu comprends pas ? Pas grave, tu reverras ça l'année prochaine, va !
Tu as déjà tout compris ? Tant mieux, c'est déjà ça de validé !

Ceci dit, je grince un peu, mais l'idée de laisser du temps à chacun, ou plutôt de laisser à chacun le temps dont il a besoin est plutôt louable. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas compris à compter en 5ème qu'on n'y arrivera jamais. Alors autant donner d'autres chances.

SAUF QUE.

Quand chacune de tes formations a commencé par "on vous rassure tout de suite, ça va pas changer grand-chose pour vous, puisqu'il y a plein de choses que vous faites déjà !", *brossage dans le sens du poil*, on a juste envie de hurler "BEN ALORS, POURQUOI TOUT CE BORDEL, BORDAŸL ?!?". C'est vrai, ça !!!

Une fois le nez dans le projet, avec tous ses cygles imcompréhensibles (AP, EPI, PEAC et j'en passe), tu trencomptes (du verbe trencompter) que QUE DALLE, tu pensais faire du bon boulot, différencier en fonction du niveau de tes élèves, adapter pour chacun ou presque (en fonction de sa dyslexie, dyspraxie, allophonie, trouble du comportement, casse-couillerie aussi), mais tu te mettais le doigt dans l'oeil. Jusqu'au coude.
Ce que nous demande la réforme ne modifie pas seulement les programmes (et les 4 années d'un coup, tankafaire), mais aussi et surtout notre façon d'enseigner. C'est toute notre pédagogie qui doit être transformée.
Mais comme souvent, les idées sont là, mais pas les moyens pour les mettre en oeuvre. Ça fait rager, sans dec.

Un exemple ?
Le travail en interdisciplinarité, c'est une bonne idée. Quand les élèves verront les volumes en Sciences Physiques, si ça peut faire écho avec le cours de maths, je suis carrément d'accord.
Proposer un cours sur la proportionnalité et les échelles au moment où ils travaillent la course d'orientation en EPS, je dis oui.

SAUF QUE.

À quel moment on travaille ensemble pour préparer tout ça ?
Comment rendre les projets cohérents quand on n'a AUCUN moment de co-animation ?
Tout va continuer à rester déconnecté, sauf qu'à la fin du trimestre, on mettra "maths-EPS" en bas d'une feuille. OKAY.

Un autre exemple ?
L'accompagnement personnel, je ne vois pas comment on pourrait être contre. Que chaque enfant puisse progresser, même d'un point de départ différent de son voisin, essayer de l'emmener plus haut, c'est génial.

SAUF QUE.

J'ai entendu beaucoup de parents dire "ah oui, et puis avec les 3 heures de soutien, mon fiston va pouvoir progresser comme il faut !". Ah mais non-non-non-non-non, padutou ! L'accompagnement PERSONNEL se fait en classe entière !!! Ahahahahahahahahahahahahahahahah, la bonne blague !!!! Il nous faut accompagner personnellement Jean-Kévin et Mamadou, en même temps que leurs 27 autres camarades de classe. Oui, parce que ça, la réforme, elle a oublié d'y penser : moins d'élèves par classe, ce sera pour 2025. Ou pas.
(j'ai envie de pleurer)
Je ne peux pas m'empêcher de penser que ce serait plus simple avec moins d'élèves par classe tout le temps. Et à ceux qui disent que ça ne change rien, 20 ou 30 élèves, je réponds d'accord, dans ce cas, j'en veux bien 20 (puisque ça ne change rien !) !!
Pas miraculeux, non, mais plus simple. Au moins dans des établissements un peu difficiles.

Et cette fois, on pourra pas dire qu'on n'a pas été formé. Si tu es le parent d'un déjà-collégien, tu as du pester un bon nombre de fois contre les changements d'emplois du temps l'an dernier, à cause des absences de profs quasi tous les jours cette année. Sache qu'à chaque fois ou presque, c'était pour essayer d'y voir plus clair dans cette réforme. Et que l'objectif n'a pas été tout à fait atteint... Mais c'est une autre histoire.

Cette rentrée, on se prend de plein fouet les nouveaux programmes, donc, la pseudo mise en place de pseudos contenus interdisciplinaires, les heures de cours fléchées AP, et je ne te parle pas des nouveaux bulletins, de la volonté à peine cachée de supprimer les notes de façon systématique, de cette usine à gaz que représente l'évaluation par compétences (sans outil informatique digne de ce nom, c'est merveilleux).

Attention, ne te méprends pas, je ne suis pas contre la réforme par principe (je déteste les principes à peu près autant que les verrues plantaires), je suis juste dépitée de voir que de bonnes idées vont donner des résultats médiocres parce qu'on aura voulu faire des économies.

Et puis on pourra lire ici ou là que, de toutes façons, avec les profs, on ne peut jamais rien réformer.
(Takakroire)

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